R.L. 18/09 : Albert Cartier : « Être plus incisifs »
Publié : 18 sept. 2014, 06:35
Albert Cartier : « Être plus incisifs »

« On ne fait encore pas assez de courses, notamment sans ballon », pointe du doigt Albert Cartier Photo AFP
S’il a vu « du mieux » dans la prestation de son équipe à Nice (1-0), l’entraîneur du FC Metz réclame néanmoins « plus de communication » et d’avantage « de jeu dans la profondeur » avant la venue de Bastia samedi.
Avec le recul, comment analysez-vous ce but concédé dans le temps additionnel à Nice ? « À chaud, c’est facile de n’accabler qu’un seul homme. Mais ce n’est pas aussi simple. Certes, c’est bien Guido ( Milan ) qui fait cette passe en retrait. Mais à y regarder de plus près, il ne s’agit pas que d’une erreur individuelle. Dès le début de cette action, on doit jouer vers l’avant. Donc ce ballon n’aurait jamais dû se retrouver là. Par ailleurs, et Romain Métanire l’a évoqué récemment à juste titre, il y a eu un problème de communication. Au final, j’estime que nous avons tous, joueurs et staff, notre part de responsabilités. À mes yeux, l’adage qui dit qu’on gagne ensemble et qu’on perd ensemble a vraiment du sens ici à Metz. »
• Le Niçois Alexy Bosetti ne joue-t-il pas également bien le coup ? « C’est un joueur malicieux et, dans le football, c’est une qualité. Après, on peut toujours contester le fait qu’il reste au sol avant de profiter son placement pour marquer… C’est rageant, mais cela fait partie du jeu. »
• Comme vous le soulignez, Romain Métanire a évoqué le manque de communication sur ce but de l’OGC Nice. Vous aviez déjà soulevé ce problème en début de saison. Est-ce un mal messin ? « J’incite évidemment mes joueurs à parler sur le terrain. Pas pour contester ou pointer du doigt une erreur d’un coéquipier. Mais bien pour donner un conseil dans le jeu, dans le replacement, avertir d’un danger, etc. Grégory Proment, par exemple, le faisait très bien, notamment dans le pressing. Au risque de faire le vieux combattant, à mon époque on communiquait énormément durant un match. Aujourd’hui, ce n’est plus le cas. Pas assez en tout cas. Ce n’est pas un mal messin. Depuis plusieurs saisons, j’ai pu constater – en Belgique, en Grèce ou en France – que beaucoup de joueurs ont du mal à prendre la parole sur le terrain. Pourtant, c’est indispensable ! »
« Dans le jeu on est mieux, mais… »
• Malgré cette cruelle défaite, avez-vous tiré des enseignements positifs de ce déplacement sur la Côte d’Azur ? « Même si l’adversaire est différent, nous avons fait preuve de bien plus de maîtrise qu’à Lille. Nous sommes parvenus à sortir très régulièrement le ballon et à frapper au but bien plus souvent que notre adversaire ( 12 frappes messines contre 9 côté niçois ). De ce point de vue, c’est une avancée. Mais si on regarde de plus près, ce sont plus de bonnes situations que de véritables occasions. »
• Que manque-t-il à votre équipe pour y parvenir ? « On ne fait encore pas assez de courses, notamment sans ballon. Pour être efficaces devant le but, il va nous falloir être plus incisifs, plus volontaires et multiplier encore et encore ces fameuses courses. Quand tu te contentes de faire tourner le ballon, de jouer simplement dans les pieds, à aucun moment tu ne fais mal à ton adversaire. Il suffit de regarder les buts inscrits en Ligue 1 : la majorité trouve son origine dans une passe, un déplacement dans la profondeur. Dans le jeu, on est mieux, mais c’est dans ce secteur qu’on doit encore progresser. »
• Et ce dès samedi face au bloc bastiais… « Oui, c’est vrai que Bastia, à l’image de son nouvel entraîneur, Claude Makélélé, possède un bloc défensif très difficile à bouger. D’où l’importance de ces courses que je viens d’évoquer. »
Jean-Sébastien GALLOIS.
Arbitrage : le poids des maux

Bruno Derrien, Denis Balbir et Jean-Marc Rodolphe. Un regard qui s’est voulu généralement critique sur le monde de l’arbitrage d’aujourd’hui. Photo Pascal BROCARD
Le FC Metz et le district mosellan de football ont organisé une conférence sur l’arbitrage. Pour l’occasion, plusieurs invités de marque étaient réunis pour décrypter la crise de l’arbitrage français. Sans langue de bois. Vendredi soir, Lionel Scheider, en collaboration avec le FC Metz et le district mosellan, organisait une grande conférence sur l'arbitrage. Pour l'occasion, plusieurs invités de marque étaient réunis pour décrypter la crise de l'arbitrage français. Sans langue de bois.
Les arbitres sont aseptisés, ils ne sont plus au service du jeu, ils sont au service de leur propre carrière. » Face à un parterre d’arbitres de district et de joueurs du centre de formation, voilà une phrase qui détonne. Mais Bruno Derrien l’assume sans complexe. L’ancien arbitre international français est un « homme libre » , qui n’a plus à se soucier d’un quelconque « devoir de réserve ».
Dans la salle de conférence du FC Metz, qui accueillait quelques invités de marque, la semaine dernière, on grince des dents. « Ils n’y vont pas de main morte », confesse un jeune arbitre de district. « Ils », car Bruno Derrien n’est pas seul dans le coup. Denis Balbir, journaliste et commentateur sportif, Robert Wurtz, célèbre arbitre de D1 au sommet de son art dans les années 70, et Jean-Marc Rodolphe, ancien gardien du FC Metz et premier joueur professionnel à s’être reconverti dans l’arbitrage, tous trois invités, pointent du doigt les maux de l’arbitrage. Et tentent de répondre à une question : comment l’arbitre est-il devenu catalyseur de toutes les frustrations ?
« Les arbitres ont perdu les clés du dialogue »
Aussi loin que nos intervenants s’en souviennent, l’homme en noir n’a jamais été autant critiqué. Si bien qu’en la présence de Robert Wurtz, l’auditoire est facilement pris d’un sentiment de nostalgie. « C’est un homme qui m’a donné envie de devenir arbitre , se souvient Bruno Derrien, par sa personnalité, il arrivait à se faire respecter et accepter les erreurs arbitrales ».
Aujourd’hui, la gestuelle grand-guignolesque de l’Alsacien a laissé place à une sobriété parfois hautaine qui confine à l’agacement. Mais, même s’ils n’ont en aucun cas l’intention d’épargner leurs pairs, ni Bruno Derrien, ni Robert Wurtz ne veulent tenir le corps arbitral pour seul responsable de cette « fracture relationnelle ».
Pour Jean-Marc Rodolphe, si les arbitres ont perdu les clés du dialogue c’est qu’on « leur impose une posture distanciée qui ne peut qu’agrandir le fossé qui les sépare des joueurs et entraîneurs ». Rapidement, c’est la gestion de la Direction Technique de l’Arbitrage qui est visée.
Intolérance généralisée
Mais pas que… Les enjeux financiers grandissants, « la défaite n’est aujourd’hui plus acceptée par personne et l’arbitre fait rapidement figure de bouc émissaire ». Une réalité économique qui, pour Denis Balbir, a exacerbé la véhémence de certains dirigeants et entraîneurs. « Aux débuts des années Canal +, je n’ai pas le souvenir de président mettant à ce point la pression sur les arbitres comme aujourd’hui ».
Et pourtant, « des erreurs, il y en a toujours eu, rebondit Robert Wurtz. Dans les années 1970, lorsque je faisais une bourde, il n’était pas rare qu’un joueur me dise que ça ne faisait rien, que c’était des choses qui arrivent ». Alors, traditionnelle cible des mécontents, et si professionnels et fans de foot n’étaient-ils pas simplement devenus de plus en plus capricieux avec l’arbitre ? Aucune réponse évidente… « Si ce n’est, peut-être, que la société n’évolue pas dans le bon sens », conclut Denis Balbir.
Victor SCHMITT.
Robert Wurtz : « Laisser sa place à l’homme »

Robert Wurtz. Photo Pascal BROCARD
Robert Wurtz, le "Nijinski du sifflet", met au ban le cynisme du football professionnel. A l'issue de la conférence, celui qu'on surnommait le "Nijinski du sifflet" a accepté de se livrer à une séance de question-réponse. Une entrevue pleine de fraîcheur qui met au ban le cynisme du football professionnel.
Robert Wurtz, on a vu lors de la conférence la difficulté que connaissent les arbitres à se faire respecter et comprendre leurs décisions. Gagneraient-ils à s’adresser davantage aux médias pour s’expliquer ? « A mon époque, la CCA (Commission Centrale des arbitres) nous interdisait aussi de nous exprimer après le match. Mais j’ai toujours pensé que c’était une façon de se mettre les journalistes à dos. Ces interdits, je préférais les outrepasser de temps en temps, car pour bien faire son travail il vaut mieux avoir la presse, le public et les joueurs de son côté. Quitte à risquer quelques inimitiés au sein des officiels. Mais je sais aussi qu’aujourd’hui, si j’arbitrais à ma façon, je serai rétrogradé au bout de quelques semaines. »
• L’utilisation de la vidéo pourrait peut-être permettre de relâcher la pression sur les arbitres… « Je ne suis pas pour. J’ai bien compris les enjeux financiers et sportifs à court terme, mais je pense que si la vidéo avait existé quand j’arbitrais, elle aurait totalement dénaturé l’aventure humaine que j’ai vécue. Il faut laisser sa place à l’homme, quitte à ce qu’il y ait quelques erreurs. »
• Avez-vous l’impression qu’arbitrer est plus difficile aujourd’hui ? « Je me garderai bien d’émettre des jugements. Il est vrai que la pression médiatique est beaucoup plus forte qu’à mon époque. Mais je pense qu’à d’autres égards, les arbitres sont très bien lotis. Ils sont mieux rétribués, peuvent mieux se libérer, profitent de stages de thalasso… Personnellement, je gagnais 40 francs par match et pour vivre ma passion, j’ai exercé huit métiers différents. J’ai été Docteur Es science, chercheur au CNRS, responsable de formation, j’ai effectué des missions pour le Conseil Général… Aujourd’hui, on n’a plus besoin de consentir ce genre de sacrifices. Les arbitres ont le temps de se préparer et de se former. »
• Vous pensez que dans le monde professionnel, la passion doit rester le principal moteur ? « Ah ça ! J’ai connu l’époque où il y avait la passion. Je pense qu’il y en a quand même encore qui l’ont, je ne suis pas désabusé, mais les temps ont changé. Aujourd’hui, vous avez ces joueurs qui gagnent des centaines de milliers d’euros et il est difficile de savoir où est la passion et où sont les intérêts personnels. Ce que je trouve dommage, car le football a été pour moi une fantastique aventure humaine. Ce qui m’a plu dans l’arbitrage, c’était l’apprentissage des caractères, de l’homme, de celui qui est heureux ou celui qui souffre des coups tordus dans les vestiaires… Cette expérience me sert toujours dans la vie ! Camus disait : " Ce que je sais de plus sûr à propos de la moralité et des obligations des hommes, c’est au football que je le dois". Une sentence que je garde toujours en tête. »
V. S.
Quid de la vidéo ?
• Bruno Derrien, l’utilisation de la vidéo pourrait-elle aider les arbitres ? « J’ai eu deux casseroles dans ma carrière. Dont une lors de Lens-Marseille en 1999, sur un tir au but d’Eric Roy que je n’avais pas vu rentrer. J’ai été suspendu un mois pour cette erreur. Depuis ce jour, je suis ouvert à l’utilisation de la vidéo. Je me rappelle d’un contrôleur qui me disait " Ah, j’ai un doute sur telle ou telle action, je vérifierai à la vidéo ". Je trouve injuste que tout le monde a droit à l’image, même les contrôleurs qui notent les arbitres, sauf les arbitres eux-mêmes. Plus personne ne se pose la question de savoir ce que l’arbitre peut voir dans SA position. »
• Et à ceux qui craignent que l’on « robotise » le football ? « Je comprends le message des anti-vidéos. C’est aussi pour sa part de hasard qu’on aime le football. Mais force est de constater que les enjeux sont tels que plus personne ne veut accepter ni l’erreur, ni la défaite. On doit toujours trouver un responsable. Et dans bien des cas, le bouc émissaire, c’est l’arbitre. Il faut faire de la pédagogie, rappeler sans cesse le respect dû à nos arbitres. Mais il faut aussi faire quelque chose pour les aider. Et je pense qu’avec un cahier des charges précis, la vidéo peut y parvenir. »
Fc Metz express
Tableau de bord. Hier : une séance d’entraînement en matinée. Aujourd’hui : une séance à 10 h. Demain : une séance à 17 h. Samedi : Metz - Bastia à 20 h. Dimanche : décrassage à 10h30.
D’un match à l’autre. Dernier match : Nice - Metz (5e journée de L1), samedi 13 septembre : 1-0. Prochain match : Metz - Bastia (6e journée de L1), samedi 20 septembre à 20 h. À suivre : Guingamp - Metz (7e journée de L1), mercredi 24 septembre à 19 h ; Metz - Reims (8e journée de L1), samedi 27 septembre à 20 h ; Évian TG - Metz (9e journée de L1), samedi 4 octobre à 20 h.
À l’infirmerie. Il n’y a pas eu de casse à l’entraînement hier. Les blessés sont donc toujours : Johann Carrasso (quadriceps), Romain Rocchi (cheville), Habib Diallo (pied) et Kwame Nsor (genou).
Les infos. Malgré la bonne entrée en jeu de David Oberhauser, samedi dernier à Nice, c’est bien Anthony Mfa qui, en l’absence de Johann Carrasso, gardera les buts messins après-demain face à Bastia.
Fadil Sido et Thibaut Vion se sont entraînés à part, hier, en compagnie de Robert Duverne. Maxwel Cornet les a rejoint lors de la seconde partie de la séance.

« On ne fait encore pas assez de courses, notamment sans ballon », pointe du doigt Albert Cartier Photo AFP
S’il a vu « du mieux » dans la prestation de son équipe à Nice (1-0), l’entraîneur du FC Metz réclame néanmoins « plus de communication » et d’avantage « de jeu dans la profondeur » avant la venue de Bastia samedi.
Avec le recul, comment analysez-vous ce but concédé dans le temps additionnel à Nice ? « À chaud, c’est facile de n’accabler qu’un seul homme. Mais ce n’est pas aussi simple. Certes, c’est bien Guido ( Milan ) qui fait cette passe en retrait. Mais à y regarder de plus près, il ne s’agit pas que d’une erreur individuelle. Dès le début de cette action, on doit jouer vers l’avant. Donc ce ballon n’aurait jamais dû se retrouver là. Par ailleurs, et Romain Métanire l’a évoqué récemment à juste titre, il y a eu un problème de communication. Au final, j’estime que nous avons tous, joueurs et staff, notre part de responsabilités. À mes yeux, l’adage qui dit qu’on gagne ensemble et qu’on perd ensemble a vraiment du sens ici à Metz. »
• Le Niçois Alexy Bosetti ne joue-t-il pas également bien le coup ? « C’est un joueur malicieux et, dans le football, c’est une qualité. Après, on peut toujours contester le fait qu’il reste au sol avant de profiter son placement pour marquer… C’est rageant, mais cela fait partie du jeu. »
• Comme vous le soulignez, Romain Métanire a évoqué le manque de communication sur ce but de l’OGC Nice. Vous aviez déjà soulevé ce problème en début de saison. Est-ce un mal messin ? « J’incite évidemment mes joueurs à parler sur le terrain. Pas pour contester ou pointer du doigt une erreur d’un coéquipier. Mais bien pour donner un conseil dans le jeu, dans le replacement, avertir d’un danger, etc. Grégory Proment, par exemple, le faisait très bien, notamment dans le pressing. Au risque de faire le vieux combattant, à mon époque on communiquait énormément durant un match. Aujourd’hui, ce n’est plus le cas. Pas assez en tout cas. Ce n’est pas un mal messin. Depuis plusieurs saisons, j’ai pu constater – en Belgique, en Grèce ou en France – que beaucoup de joueurs ont du mal à prendre la parole sur le terrain. Pourtant, c’est indispensable ! »
« Dans le jeu on est mieux, mais… »
• Malgré cette cruelle défaite, avez-vous tiré des enseignements positifs de ce déplacement sur la Côte d’Azur ? « Même si l’adversaire est différent, nous avons fait preuve de bien plus de maîtrise qu’à Lille. Nous sommes parvenus à sortir très régulièrement le ballon et à frapper au but bien plus souvent que notre adversaire ( 12 frappes messines contre 9 côté niçois ). De ce point de vue, c’est une avancée. Mais si on regarde de plus près, ce sont plus de bonnes situations que de véritables occasions. »
• Que manque-t-il à votre équipe pour y parvenir ? « On ne fait encore pas assez de courses, notamment sans ballon. Pour être efficaces devant le but, il va nous falloir être plus incisifs, plus volontaires et multiplier encore et encore ces fameuses courses. Quand tu te contentes de faire tourner le ballon, de jouer simplement dans les pieds, à aucun moment tu ne fais mal à ton adversaire. Il suffit de regarder les buts inscrits en Ligue 1 : la majorité trouve son origine dans une passe, un déplacement dans la profondeur. Dans le jeu, on est mieux, mais c’est dans ce secteur qu’on doit encore progresser. »
• Et ce dès samedi face au bloc bastiais… « Oui, c’est vrai que Bastia, à l’image de son nouvel entraîneur, Claude Makélélé, possède un bloc défensif très difficile à bouger. D’où l’importance de ces courses que je viens d’évoquer. »
Jean-Sébastien GALLOIS.
Arbitrage : le poids des maux

Bruno Derrien, Denis Balbir et Jean-Marc Rodolphe. Un regard qui s’est voulu généralement critique sur le monde de l’arbitrage d’aujourd’hui. Photo Pascal BROCARD
Le FC Metz et le district mosellan de football ont organisé une conférence sur l’arbitrage. Pour l’occasion, plusieurs invités de marque étaient réunis pour décrypter la crise de l’arbitrage français. Sans langue de bois. Vendredi soir, Lionel Scheider, en collaboration avec le FC Metz et le district mosellan, organisait une grande conférence sur l'arbitrage. Pour l'occasion, plusieurs invités de marque étaient réunis pour décrypter la crise de l'arbitrage français. Sans langue de bois.
Les arbitres sont aseptisés, ils ne sont plus au service du jeu, ils sont au service de leur propre carrière. » Face à un parterre d’arbitres de district et de joueurs du centre de formation, voilà une phrase qui détonne. Mais Bruno Derrien l’assume sans complexe. L’ancien arbitre international français est un « homme libre » , qui n’a plus à se soucier d’un quelconque « devoir de réserve ».
Dans la salle de conférence du FC Metz, qui accueillait quelques invités de marque, la semaine dernière, on grince des dents. « Ils n’y vont pas de main morte », confesse un jeune arbitre de district. « Ils », car Bruno Derrien n’est pas seul dans le coup. Denis Balbir, journaliste et commentateur sportif, Robert Wurtz, célèbre arbitre de D1 au sommet de son art dans les années 70, et Jean-Marc Rodolphe, ancien gardien du FC Metz et premier joueur professionnel à s’être reconverti dans l’arbitrage, tous trois invités, pointent du doigt les maux de l’arbitrage. Et tentent de répondre à une question : comment l’arbitre est-il devenu catalyseur de toutes les frustrations ?
« Les arbitres ont perdu les clés du dialogue »
Aussi loin que nos intervenants s’en souviennent, l’homme en noir n’a jamais été autant critiqué. Si bien qu’en la présence de Robert Wurtz, l’auditoire est facilement pris d’un sentiment de nostalgie. « C’est un homme qui m’a donné envie de devenir arbitre , se souvient Bruno Derrien, par sa personnalité, il arrivait à se faire respecter et accepter les erreurs arbitrales ».
Aujourd’hui, la gestuelle grand-guignolesque de l’Alsacien a laissé place à une sobriété parfois hautaine qui confine à l’agacement. Mais, même s’ils n’ont en aucun cas l’intention d’épargner leurs pairs, ni Bruno Derrien, ni Robert Wurtz ne veulent tenir le corps arbitral pour seul responsable de cette « fracture relationnelle ».
Pour Jean-Marc Rodolphe, si les arbitres ont perdu les clés du dialogue c’est qu’on « leur impose une posture distanciée qui ne peut qu’agrandir le fossé qui les sépare des joueurs et entraîneurs ». Rapidement, c’est la gestion de la Direction Technique de l’Arbitrage qui est visée.
Intolérance généralisée
Mais pas que… Les enjeux financiers grandissants, « la défaite n’est aujourd’hui plus acceptée par personne et l’arbitre fait rapidement figure de bouc émissaire ». Une réalité économique qui, pour Denis Balbir, a exacerbé la véhémence de certains dirigeants et entraîneurs. « Aux débuts des années Canal +, je n’ai pas le souvenir de président mettant à ce point la pression sur les arbitres comme aujourd’hui ».
Et pourtant, « des erreurs, il y en a toujours eu, rebondit Robert Wurtz. Dans les années 1970, lorsque je faisais une bourde, il n’était pas rare qu’un joueur me dise que ça ne faisait rien, que c’était des choses qui arrivent ». Alors, traditionnelle cible des mécontents, et si professionnels et fans de foot n’étaient-ils pas simplement devenus de plus en plus capricieux avec l’arbitre ? Aucune réponse évidente… « Si ce n’est, peut-être, que la société n’évolue pas dans le bon sens », conclut Denis Balbir.
Victor SCHMITT.
Robert Wurtz : « Laisser sa place à l’homme »

Robert Wurtz. Photo Pascal BROCARD
Robert Wurtz, le "Nijinski du sifflet", met au ban le cynisme du football professionnel. A l'issue de la conférence, celui qu'on surnommait le "Nijinski du sifflet" a accepté de se livrer à une séance de question-réponse. Une entrevue pleine de fraîcheur qui met au ban le cynisme du football professionnel.
Robert Wurtz, on a vu lors de la conférence la difficulté que connaissent les arbitres à se faire respecter et comprendre leurs décisions. Gagneraient-ils à s’adresser davantage aux médias pour s’expliquer ? « A mon époque, la CCA (Commission Centrale des arbitres) nous interdisait aussi de nous exprimer après le match. Mais j’ai toujours pensé que c’était une façon de se mettre les journalistes à dos. Ces interdits, je préférais les outrepasser de temps en temps, car pour bien faire son travail il vaut mieux avoir la presse, le public et les joueurs de son côté. Quitte à risquer quelques inimitiés au sein des officiels. Mais je sais aussi qu’aujourd’hui, si j’arbitrais à ma façon, je serai rétrogradé au bout de quelques semaines. »
• L’utilisation de la vidéo pourrait peut-être permettre de relâcher la pression sur les arbitres… « Je ne suis pas pour. J’ai bien compris les enjeux financiers et sportifs à court terme, mais je pense que si la vidéo avait existé quand j’arbitrais, elle aurait totalement dénaturé l’aventure humaine que j’ai vécue. Il faut laisser sa place à l’homme, quitte à ce qu’il y ait quelques erreurs. »
• Avez-vous l’impression qu’arbitrer est plus difficile aujourd’hui ? « Je me garderai bien d’émettre des jugements. Il est vrai que la pression médiatique est beaucoup plus forte qu’à mon époque. Mais je pense qu’à d’autres égards, les arbitres sont très bien lotis. Ils sont mieux rétribués, peuvent mieux se libérer, profitent de stages de thalasso… Personnellement, je gagnais 40 francs par match et pour vivre ma passion, j’ai exercé huit métiers différents. J’ai été Docteur Es science, chercheur au CNRS, responsable de formation, j’ai effectué des missions pour le Conseil Général… Aujourd’hui, on n’a plus besoin de consentir ce genre de sacrifices. Les arbitres ont le temps de se préparer et de se former. »
• Vous pensez que dans le monde professionnel, la passion doit rester le principal moteur ? « Ah ça ! J’ai connu l’époque où il y avait la passion. Je pense qu’il y en a quand même encore qui l’ont, je ne suis pas désabusé, mais les temps ont changé. Aujourd’hui, vous avez ces joueurs qui gagnent des centaines de milliers d’euros et il est difficile de savoir où est la passion et où sont les intérêts personnels. Ce que je trouve dommage, car le football a été pour moi une fantastique aventure humaine. Ce qui m’a plu dans l’arbitrage, c’était l’apprentissage des caractères, de l’homme, de celui qui est heureux ou celui qui souffre des coups tordus dans les vestiaires… Cette expérience me sert toujours dans la vie ! Camus disait : " Ce que je sais de plus sûr à propos de la moralité et des obligations des hommes, c’est au football que je le dois". Une sentence que je garde toujours en tête. »
V. S.
Quid de la vidéo ?
• Bruno Derrien, l’utilisation de la vidéo pourrait-elle aider les arbitres ? « J’ai eu deux casseroles dans ma carrière. Dont une lors de Lens-Marseille en 1999, sur un tir au but d’Eric Roy que je n’avais pas vu rentrer. J’ai été suspendu un mois pour cette erreur. Depuis ce jour, je suis ouvert à l’utilisation de la vidéo. Je me rappelle d’un contrôleur qui me disait " Ah, j’ai un doute sur telle ou telle action, je vérifierai à la vidéo ". Je trouve injuste que tout le monde a droit à l’image, même les contrôleurs qui notent les arbitres, sauf les arbitres eux-mêmes. Plus personne ne se pose la question de savoir ce que l’arbitre peut voir dans SA position. »
• Et à ceux qui craignent que l’on « robotise » le football ? « Je comprends le message des anti-vidéos. C’est aussi pour sa part de hasard qu’on aime le football. Mais force est de constater que les enjeux sont tels que plus personne ne veut accepter ni l’erreur, ni la défaite. On doit toujours trouver un responsable. Et dans bien des cas, le bouc émissaire, c’est l’arbitre. Il faut faire de la pédagogie, rappeler sans cesse le respect dû à nos arbitres. Mais il faut aussi faire quelque chose pour les aider. Et je pense qu’avec un cahier des charges précis, la vidéo peut y parvenir. »
Fc Metz express
Tableau de bord. Hier : une séance d’entraînement en matinée. Aujourd’hui : une séance à 10 h. Demain : une séance à 17 h. Samedi : Metz - Bastia à 20 h. Dimanche : décrassage à 10h30.
D’un match à l’autre. Dernier match : Nice - Metz (5e journée de L1), samedi 13 septembre : 1-0. Prochain match : Metz - Bastia (6e journée de L1), samedi 20 septembre à 20 h. À suivre : Guingamp - Metz (7e journée de L1), mercredi 24 septembre à 19 h ; Metz - Reims (8e journée de L1), samedi 27 septembre à 20 h ; Évian TG - Metz (9e journée de L1), samedi 4 octobre à 20 h.
À l’infirmerie. Il n’y a pas eu de casse à l’entraînement hier. Les blessés sont donc toujours : Johann Carrasso (quadriceps), Romain Rocchi (cheville), Habib Diallo (pied) et Kwame Nsor (genou).
Les infos. Malgré la bonne entrée en jeu de David Oberhauser, samedi dernier à Nice, c’est bien Anthony Mfa qui, en l’absence de Johann Carrasso, gardera les buts messins après-demain face à Bastia.
Fadil Sido et Thibaut Vion se sont entraînés à part, hier, en compagnie de Robert Duverne. Maxwel Cornet les a rejoint lors de la seconde partie de la séance.