Souvent, il parcourt seul le chemin menant du stade d’entraînement aux vestiaires. Aussi souvent, il quitte, seul, les entrailles de Saint-Symphorien pour regagner son domicile. Alexander Odegaard (prononcez "oudegarde") n’est pourtant pas un solitaire dans l’âme : « Je m’entends bien avec tout le monde, je n’ai aucun problème avec mes partenaires », assure-t-il dans la langue de Shakespeare.
Aucun problème mais également très peu d’affinités. Le premier norvégien de l’histoire du FC Metz se heurte, depuis son arrivée en décembre dernier, à une barrière bien dure à franchir pour un exilé du grand Nord : « La langue, il y a un vrai problème de communication ce qui entraîne des difficultés d’intégration, déplore Dominique Bijotat. On ne peut pas dire qu’il s’est imposé dans ce groupe, qu’il a trouvé sa place. » Sur et en dehors du terrain…
Le milieu de terrain, avec franchise, se sait marginalisé. Lui aussi exibe l’argument de la langue : « En Norvège, la deuxième langue pratiquée est l’anglais. En France, c’est plutôt l’allemand, voire l’espagnol. Dans ce contexte, ce n’est pas simple de se faire comprendre ». L’effort ne devrait-il pas venir de lui ? « Mais interrogez-le en français ! », conseillait hier Joël Muller lors de notre entretien. Cette séance de torture n’a finalement pas eu lieu : « Je comprends le français, un peu. Mais c’est bien plus dur pour moi de m’exprimer ». L’homme est à moitié excusé, car le pourcentage de Français capable de manier le Norvégien après six mois de séjour en Scandinavie serait bien faible. "Er ikke?" (N’est-ce pas ?)
« Step by step »
Reste ce langage censé être connu de tous au FC Metz : le football dont la pratique ne connaît, habituellement, pas de frontières. Mais sur ce point encore, Alexander Odegaard peine à se faire comprendre. Voire accepter : « Il manque d’explosivité, ce qui n’est pas sa qualité première, stigmatise l’entraîneur messin. Si cela se voyait sur les vidéos visionnées avant son recrutement ? Hum, il y a quand même une différence entre ce que nous avons vu et ce que nous voyons depuis son arrivée. »
Ces propos trahissent une pointe d’impatience chez Dominique Bijotat. Le technicien attend légitimement mieux de son milieu de terrain polyvalent. L’intéressé, qui vit à presque 31 ans sa première expérience loin du Royaume de Norvège, le reconnaît lui aussi : « Je suis arrivé alors que mon championnat se finissait. Le contexte dans lequel se trouvait le club, les difficultés en Ligue 2, ne m’ont pas été favorables. Il fallait que je découvre un nouveau style de jeu, que je m’adapte à un nouveau mode de vie dans l’urgence. Cela n’a pas été simple ».
D’un revers de main, Alexander Odegaard repousse ses débuts manqués. Sa longue chevelure, il compte bien la faire danser au cœur des défenses de Ligue 2 cette saison : « J’y vais "step by step" (étape par étape). Cette saison, je reprends tout à zéro en même temps que mes partenaires. La reprise, la préparation, les matchs amicaux, tout ! Je suis sur la ligne de départ avec les mêmes armes que les autres ». Mais pas forcément avec le même statut. Ses deux buts inscrits durant la campagne amicale ne sauraient masquer son goût très (trop ?) prononcé pour la passe en retrait. Le profil de l’ancien joueur du Viking Stavanger VK ne semble pas épouser le style de jeu espéré par Dominique Bijotat. Mais il ne s’agit là que d’une impression…
Jean-Michel CAVALLI.