Les Soldats de l'an 01 (analyse et perspectives)
Publié : 01 sept. 2012, 11:35
Les soldats de l'an 01
Analyse et perspectives
« Soldats, vous êtes nus, mal nourris ; le gouvernement vous doit beaucoup, il ne peut rien vous donner. Votre patience, le courage que vous montrez au milieu de ces rochers sont admirables ; mais ils ne vous procurent aucune gloire, aucun éclat ne rejaillit sur vous. Je veux vous conduire dans les plus fertiles plaines du monde. De riches provinces, de grandes villes seront en votre pouvoir ; vous y trouverez honneur, gloire et richesse. Soldats d'Italie, manqueriez-vous de courage ou de constance ? ».
Napoléon Bonaparte, discours à l'armée d'Italie, 1796
On permettra à un vieux grognard comme moi, qui a vécu tant de campagnes et vu, au final plus de Waterloo et de Bérézina que d'Austerlitz, d'avoir attendu une septième victoire de rang pour donner son sentiment et faire partager des perspectives plus qu'engageantes. Nous voilà au commencement d'une reconquête, rendue possible par la prise de pouvoir réelle de Bernard Serin, dont je considère qu'il s'agit de la première année effective de direction du club. Reconquête des cœurs, reconquête sportive sont aussi les objectifs clairement visés. Et pas des moindres, car je l'affirme, c'est la ligue 1 qui est fixée comme but à atteindre par cette bande de gamins qui ont pour rêve secret d'entrer dans la légende du club en le ramenant là où est sa place...
L'an 01 de la présidence Serin
La seule vertu de la descente en national c'est d'avoir rendu nécessaire le coup de balai qui a chassé les débris d'un système qui a montré ses limites ultimes. Il n'est pas à remettre en cause le rôle et l'apport, par le passé, d'un triumvirat qui à lui seul symbolisait le FC Metz de ces quarante dernières années. Le bilan de Carlo Molinari demeure digne de respect, quand on le remet en perspective, celui de Joel Muller en tant qu'entraîneur et jusqu'à son départ pour Lens, s'inscrit en lettre d'or au frontispice du musée de nos trophées. La direction générale de Patrick Razurel me semble être exemplaire de la dérive qui a gangrené le club. Quand les langues se sont déliées, après le désastre de la descente en national, on a pu prendre la mesure de la confusion totale entre sportif et administratif, ce qui a rendu la responsabilité collective de ces trois hommes absolue et au final a permis de relativiser les causes d'échec des entraîneurs et de certaines réactions de joueurs.
Il fallait à Bernard Serin pour sauver le club continuer et changer. Continuer à mettre la main à la poche et en appeler aux actionnaires pour la survie financière du club, renoncer aux projets de prestige, prendre conscience, à la Molinari en 1967, qu'il se retrouve à la tête d'un club de troisième zone, une idole déchue, une équipe et un club qui ont enterré l'amour qui le liait à son public, détruit l'identité de ses valeurs et instillé comme un poison le goût amer des défaites et le glas obsédant de la fatalité comme seul horizon. Il fallait à Bernard Serin pour sauver le club tuer symboliquement le père, se débarrasser du triumvirat et faire revenir le fils prodigue, paria certes, mais gladiateur en puissance, aboyeur en diable, sergent-la-terreur et revanchard. Il fallait scinder et hiérarchiser le sportif de l'administratif, remettre l'avenir du club à une bande de gamins et l'entourer de quelques soldats de fortune en quête de lumière.
Le plan de campagne
Serin se retrouve dans l'éternelle situation molinaresque quand le club touche le fond de la relégation en un troisième étage jamais atteint et qui ressemble à s'y méprendre à un 36e dessous. Il faut faire remonter le club au plus vite. Sauf que cette fois c'est plus que vital, car c'est le statut professionnel du FC Metz qui est en jeu. Il sait cependant, comme tout stratège des temps modernes, que la communication est une arme bien plus redoutable quand elle s'inscrit dans les symboles. S'il sait que sportivement, et quoi qu'en pensent certains esprits chagrins, l'équipe de Metz va faire figure d'épouvantail à juste titre, s'il sait que joueurs et staff ont conscience que la dynamique de victoire est à portée de main, rien ne se gagne vraiment que par la ferveur, le désir et la joie, la fierté et l'enthousiasme qui bâtissent les épopées. Alors s’inscrivent les rituels de communion, le retour du sacré, l'humilité des soldats au service de la république des tribunes. On nous promet la même grandeur dans les défaites. Et ça marche. Il faut dire que la vraie révolution vient du jeu.
Ce qu'Albert Cartier propose, c'est, au delà des mots et des discours, un retour au FC Metz d'avant l'ère Muller, et ce sont les mânes de Georges Huart, d'Henrik Kasperszac ou de Marcel Husson qui sont ici convoquées. Ce qu'Albert Cartier propose, ce résume au fond à peu de chose, mais ces principes simples, dérisoires de simplicité, suffisent à notre enchantement. J'en verrai trois.
Premier principe, l'animation offensive. Chez Cartier le schéma tactique vaut surtout en phase défensive. Quand on n'a plus la balle, on peut voir se mettre sur le terrain le dispositif que la composition d'équipe sous-tend, mais dès que nous avons la balle... tout explose dans un seul but, aller à l'avant. La position des arrières latéraux est à ce sujet hautement instructive. Positionnés très haut, parfois même au delà de la ligne médiane, ils constituent un fer de lance offensif. Une fois la balle en notre possession le zone offensive se remplit de trois à quatre joueurs qui proposent autant de solutions.
Second principe, les phases de préparation. Si Pouliquen et Bijotat ont ambitionné de discipliner le jeu messin quitte à le sacrifier à l'exigence de la circulation de balle dans d'interminables phases de préparation offensives dont l'application le disputait à l'ennui, Albert Cartier n'a de cesse de la raccourcir. Cela donne à son équipe un coté chien fou assez rafraîchissant, cela n'évite pas quelques approximations techniques mais au profit d'une vivacité de tous les instants, d'une porte ouverte à la créativité et à l'audace, d'une prise de risque constante.
Troisième et dernier principe, le rythme. La pierre angulaire sur laquelle repose tout le système c'est la nécessité draconienne d'entretenir une condition physique à toute épreuve.Pourquoi une telle dureté dans la préparation physique ? Pas pour le plaisir sadique d'en faire des hommes dans la souffrances et l'effort ingrat et collectif, mais pour en faire des ludions virevoltants propres à anéantir la résistance d'équipes semi professionnelles.
Le match d'hier soir en est la démonstration , avec ses limites. Quand dans un an ou deux cette équipe aura appris à poser le jeu, ce qu'elle ne sait absolument pas faire à cette heure-ci, elle sera affûtée pour des batailles d'une autre ampleur...
Objectif Lune
La liberté de ma plume m'autorise à formuler ici ce qui transpire de toutes les interviews, mais qui n'ose s'affirmer autrement que par les faits. Alors je l'affirme, comme je l'ai affirmé à quelques un avant même le début de la saison, Le FC Metz va survoler le national, car l'objectif est clair, simple et impertinent. Ces gamins savent qu'ils sont investis de la mission la plus importante de l'histoire du club, ils savent qu'ils ont un dragon à réveiller, une fierté à ranimer, un destin à inscrire au marbre du cénotaphe. La ligue 2 n'est pas l'objectif, ce n'est que la prochaine étape, le marchepied vers un Graal que tout un peuple espère. Nous voulons retourner à l'Histoire. A celle qui nous appartient de droit. A notre place. Légitimée par le passé, outragée par le déclin, elle est, cette place, à reconquérir par l'épopée.
Il me plaît à penser, quand assis dans ce vieux stade vide je contemple mes souvenirs, que lorsque les travées vomiront leurs clameurs et que les tribunes seront gorgées d'enthousiasme aux lumières de la ligue 1, je pourrai dire j'étais là quand nous n’étions que 5 000 à y croire, contre Luzenac...
Nous n'avons, dès lors que deux adversaires sérieux, ces deux prochaines années...
Le premier, c'est nous même. Car je l'affirme, personne en National, n'est en mesure de nous inquiéter sur la longueur. Notre seul ennemi, c'est notre possible inconstance. Et si défaite il devait y avoir un jour ou l'autre, nous savons tous qu'elle sera de l'ordre de l'accident de parcours. Et notre pardon leur est acquis d'avance, pour peu qu'il perdent comme ils gagnent en ce moment, c'est à dire les armes à la main...
Le second adversaire, c'est la logique économique. Elle vient de nous frapper. Contre Tours je me faisait cette réflexion : « au fond cette équipe est homogène, à part Mané qui est un cran au dessus ». Je ne devais pas être le seul à le remarquer.... Et à voir Maxwell Cornet faire sa roulette hier soir, à peine entré sur le terrain et du haut de ses seize ans, il me vient à me dire :
« et celui là, combien de temps le garderons nous ? »
Si les chiffres qui se murmurent s'avèrent être exacts, la vente de Mané vient de renflouer le club.
Dont acte.
Sur le plan sportif c'est une perte indéniable.
Mais pour finir sur une note optimiste et récompenser la patience du lecteur parvenu jusqu'aux rives de ma conclusion, cette perte ne me semble pas rédhibitoire et j'ose le pari qu'elle sera profitable à certain qui pourront trouver place à exprimer un talent tout aussi prometteur, je pense à Bouna Sarr en particulier...
Analyse et perspectives
« Soldats, vous êtes nus, mal nourris ; le gouvernement vous doit beaucoup, il ne peut rien vous donner. Votre patience, le courage que vous montrez au milieu de ces rochers sont admirables ; mais ils ne vous procurent aucune gloire, aucun éclat ne rejaillit sur vous. Je veux vous conduire dans les plus fertiles plaines du monde. De riches provinces, de grandes villes seront en votre pouvoir ; vous y trouverez honneur, gloire et richesse. Soldats d'Italie, manqueriez-vous de courage ou de constance ? ».
Napoléon Bonaparte, discours à l'armée d'Italie, 1796
On permettra à un vieux grognard comme moi, qui a vécu tant de campagnes et vu, au final plus de Waterloo et de Bérézina que d'Austerlitz, d'avoir attendu une septième victoire de rang pour donner son sentiment et faire partager des perspectives plus qu'engageantes. Nous voilà au commencement d'une reconquête, rendue possible par la prise de pouvoir réelle de Bernard Serin, dont je considère qu'il s'agit de la première année effective de direction du club. Reconquête des cœurs, reconquête sportive sont aussi les objectifs clairement visés. Et pas des moindres, car je l'affirme, c'est la ligue 1 qui est fixée comme but à atteindre par cette bande de gamins qui ont pour rêve secret d'entrer dans la légende du club en le ramenant là où est sa place...
L'an 01 de la présidence Serin
La seule vertu de la descente en national c'est d'avoir rendu nécessaire le coup de balai qui a chassé les débris d'un système qui a montré ses limites ultimes. Il n'est pas à remettre en cause le rôle et l'apport, par le passé, d'un triumvirat qui à lui seul symbolisait le FC Metz de ces quarante dernières années. Le bilan de Carlo Molinari demeure digne de respect, quand on le remet en perspective, celui de Joel Muller en tant qu'entraîneur et jusqu'à son départ pour Lens, s'inscrit en lettre d'or au frontispice du musée de nos trophées. La direction générale de Patrick Razurel me semble être exemplaire de la dérive qui a gangrené le club. Quand les langues se sont déliées, après le désastre de la descente en national, on a pu prendre la mesure de la confusion totale entre sportif et administratif, ce qui a rendu la responsabilité collective de ces trois hommes absolue et au final a permis de relativiser les causes d'échec des entraîneurs et de certaines réactions de joueurs.
Il fallait à Bernard Serin pour sauver le club continuer et changer. Continuer à mettre la main à la poche et en appeler aux actionnaires pour la survie financière du club, renoncer aux projets de prestige, prendre conscience, à la Molinari en 1967, qu'il se retrouve à la tête d'un club de troisième zone, une idole déchue, une équipe et un club qui ont enterré l'amour qui le liait à son public, détruit l'identité de ses valeurs et instillé comme un poison le goût amer des défaites et le glas obsédant de la fatalité comme seul horizon. Il fallait à Bernard Serin pour sauver le club tuer symboliquement le père, se débarrasser du triumvirat et faire revenir le fils prodigue, paria certes, mais gladiateur en puissance, aboyeur en diable, sergent-la-terreur et revanchard. Il fallait scinder et hiérarchiser le sportif de l'administratif, remettre l'avenir du club à une bande de gamins et l'entourer de quelques soldats de fortune en quête de lumière.
Le plan de campagne
Serin se retrouve dans l'éternelle situation molinaresque quand le club touche le fond de la relégation en un troisième étage jamais atteint et qui ressemble à s'y méprendre à un 36e dessous. Il faut faire remonter le club au plus vite. Sauf que cette fois c'est plus que vital, car c'est le statut professionnel du FC Metz qui est en jeu. Il sait cependant, comme tout stratège des temps modernes, que la communication est une arme bien plus redoutable quand elle s'inscrit dans les symboles. S'il sait que sportivement, et quoi qu'en pensent certains esprits chagrins, l'équipe de Metz va faire figure d'épouvantail à juste titre, s'il sait que joueurs et staff ont conscience que la dynamique de victoire est à portée de main, rien ne se gagne vraiment que par la ferveur, le désir et la joie, la fierté et l'enthousiasme qui bâtissent les épopées. Alors s’inscrivent les rituels de communion, le retour du sacré, l'humilité des soldats au service de la république des tribunes. On nous promet la même grandeur dans les défaites. Et ça marche. Il faut dire que la vraie révolution vient du jeu.
Ce qu'Albert Cartier propose, c'est, au delà des mots et des discours, un retour au FC Metz d'avant l'ère Muller, et ce sont les mânes de Georges Huart, d'Henrik Kasperszac ou de Marcel Husson qui sont ici convoquées. Ce qu'Albert Cartier propose, ce résume au fond à peu de chose, mais ces principes simples, dérisoires de simplicité, suffisent à notre enchantement. J'en verrai trois.
Premier principe, l'animation offensive. Chez Cartier le schéma tactique vaut surtout en phase défensive. Quand on n'a plus la balle, on peut voir se mettre sur le terrain le dispositif que la composition d'équipe sous-tend, mais dès que nous avons la balle... tout explose dans un seul but, aller à l'avant. La position des arrières latéraux est à ce sujet hautement instructive. Positionnés très haut, parfois même au delà de la ligne médiane, ils constituent un fer de lance offensif. Une fois la balle en notre possession le zone offensive se remplit de trois à quatre joueurs qui proposent autant de solutions.
Second principe, les phases de préparation. Si Pouliquen et Bijotat ont ambitionné de discipliner le jeu messin quitte à le sacrifier à l'exigence de la circulation de balle dans d'interminables phases de préparation offensives dont l'application le disputait à l'ennui, Albert Cartier n'a de cesse de la raccourcir. Cela donne à son équipe un coté chien fou assez rafraîchissant, cela n'évite pas quelques approximations techniques mais au profit d'une vivacité de tous les instants, d'une porte ouverte à la créativité et à l'audace, d'une prise de risque constante.
Troisième et dernier principe, le rythme. La pierre angulaire sur laquelle repose tout le système c'est la nécessité draconienne d'entretenir une condition physique à toute épreuve.Pourquoi une telle dureté dans la préparation physique ? Pas pour le plaisir sadique d'en faire des hommes dans la souffrances et l'effort ingrat et collectif, mais pour en faire des ludions virevoltants propres à anéantir la résistance d'équipes semi professionnelles.
Le match d'hier soir en est la démonstration , avec ses limites. Quand dans un an ou deux cette équipe aura appris à poser le jeu, ce qu'elle ne sait absolument pas faire à cette heure-ci, elle sera affûtée pour des batailles d'une autre ampleur...
Objectif Lune
La liberté de ma plume m'autorise à formuler ici ce qui transpire de toutes les interviews, mais qui n'ose s'affirmer autrement que par les faits. Alors je l'affirme, comme je l'ai affirmé à quelques un avant même le début de la saison, Le FC Metz va survoler le national, car l'objectif est clair, simple et impertinent. Ces gamins savent qu'ils sont investis de la mission la plus importante de l'histoire du club, ils savent qu'ils ont un dragon à réveiller, une fierté à ranimer, un destin à inscrire au marbre du cénotaphe. La ligue 2 n'est pas l'objectif, ce n'est que la prochaine étape, le marchepied vers un Graal que tout un peuple espère. Nous voulons retourner à l'Histoire. A celle qui nous appartient de droit. A notre place. Légitimée par le passé, outragée par le déclin, elle est, cette place, à reconquérir par l'épopée.
Il me plaît à penser, quand assis dans ce vieux stade vide je contemple mes souvenirs, que lorsque les travées vomiront leurs clameurs et que les tribunes seront gorgées d'enthousiasme aux lumières de la ligue 1, je pourrai dire j'étais là quand nous n’étions que 5 000 à y croire, contre Luzenac...
Nous n'avons, dès lors que deux adversaires sérieux, ces deux prochaines années...
Le premier, c'est nous même. Car je l'affirme, personne en National, n'est en mesure de nous inquiéter sur la longueur. Notre seul ennemi, c'est notre possible inconstance. Et si défaite il devait y avoir un jour ou l'autre, nous savons tous qu'elle sera de l'ordre de l'accident de parcours. Et notre pardon leur est acquis d'avance, pour peu qu'il perdent comme ils gagnent en ce moment, c'est à dire les armes à la main...
Le second adversaire, c'est la logique économique. Elle vient de nous frapper. Contre Tours je me faisait cette réflexion : « au fond cette équipe est homogène, à part Mané qui est un cran au dessus ». Je ne devais pas être le seul à le remarquer.... Et à voir Maxwell Cornet faire sa roulette hier soir, à peine entré sur le terrain et du haut de ses seize ans, il me vient à me dire :
« et celui là, combien de temps le garderons nous ? »
Si les chiffres qui se murmurent s'avèrent être exacts, la vente de Mané vient de renflouer le club.
Dont acte.
Sur le plan sportif c'est une perte indéniable.
Mais pour finir sur une note optimiste et récompenser la patience du lecteur parvenu jusqu'aux rives de ma conclusion, cette perte ne me semble pas rédhibitoire et j'ose le pari qu'elle sera profitable à certain qui pourront trouver place à exprimer un talent tout aussi prometteur, je pense à Bouna Sarr en particulier...