Sans surprise, Strasbourg figure dans la liste des douze villes qui espèrent accueillir l'Euro-2016. Si elle a écarté hier les dossiers de Metz et de Montpellier, la Fédération française de football (FFF) n'a en revanche pas distingué les neuf "titulaires" des trois "remplaçantes". Le match ne fait que commencer.
Selon cette illustration d'artiste qui figure dans le dossier de candidature, voilà ce à quoi pourrait ressembler la nouvelle Meinau. (Document remis)
C'est peu après seize heures, hier au siège parisien de la FFF, que le dossier strasbourgeois a pris un tour nouveau, passant du probable au concret. Aux côtés d'onze autres villes (*), la capitale européenne sait désormais qu'elle défendra les couleurs françaises dans le match qui l'oppose à l'Italie, la Turquie et le binôme suédo-norvégien pour l'organisation de l'Euro-2016.
Ries : « Nous n'avons
franchi qu'une demi-étape »
« C'est évidemment un sentiment de satisfaction qui domine, mais nous n'avons franchi qu'une demi-étape », relativise Roland Ries. La retenue du maire de Strasbourg s'explique essentiellement par le fait que le conseil fédéral n'a pas distingué dans les douze sites retenus les neuf qui seront titulaires.
Fatalement, trois villes "réservistes" verront le train de l'Euro partir sans elles, à condition que la France l'emporte le 28 mai 2010. Pour filer la métaphore du ballon rond, Strasbourg figure sur la feuille de match mais ne sait pas encore si elle débutera la rencontre ou prendra place sur le banc.
Sauf que dans cette compétition-là, on doute que les remplaçants aient la moindre chance de fouler le terrain de l'Euro. Mieux vaut donc gagner sa place dans les neuf avant le 15 février et la remise du dossier tricolore sur le bureau de l'UEFA.
A ce titre, Roland Ries dit n'avoir « aucune garantie » des instances fédérales mais veut croire que les « atouts de la Ville et de la région » sauront peser dans la balance à l'heure du choix.
« Avec près de 90 000 licenciés, l'Alsace est une terre de football, ajoute le maire. La tradition européenne très marquée à Strasbourg joue aussi sur la conscience collective et celle de la Fédération, j'en suis persuadé. »
Trois candidatures
conditionnées à l'aide
de l'État
Si la FFF n'a « pas raisonné en terme géographique, la preuve étant que l'Ouest manque à l'appel », selon son président Jean-Pierre Escalettes, force est de constater qu'il reste encore en lice deux villes à l'Est, après la mise à l'écart de Metz.
« Je ne pense pas que Nancy et Strasbourg soient en concurrence directe, estime Jacques Bigot, le président de la communauté urbaine (CUS). Le problème de la suppléance concerne plus des villes comme Lens et Lille, Bordeaux et Toulouse ou Marseille et Nice. Nous avons toutes nos chances. »
Plus que des rivalités régionales, il était surtout hier question du financement des projets, qu'il s'agisse de la rénovation des stades ou de la construction de nouvelles enceintes. L'arbitrage devrait d'ailleurs se jouer sur ce terrain-là, puisque trois villes ont déjà conditionné leur candidature à l'aide de l'État.
A Lille, Martine Aubry réclame 45M d'euros. A Bordeaux, Alain Juppé en demande 50. Quant à Toulouse, elle « veut que 20% des travaux, soit entre 10 et 11M d'euros, soient financés par une aide de l'État. »
Strasbourg, elle, se montre moins vindicative. Jacques Bigot rappelle que la « candidature n'a jamais été subordonnée à la participation de l'État » et privilégie « la discussion, même si l'enveloppe globale de 150M€ proposée par M. Fillon n'est pas satisfaisante. »
Avec « 110M€ à notre
charge, on en fera
notre affaire »
Dans le même ton, Roland Ries n'a encore rien revendiqué mais déplore qu'« à l'évidence, la somme n'est pas à la hauteur des enjeux, au regard de l'investissement estimé à 160M€ pour la rénovation de la Meinau. »
Le sénateur-maire a surtout remarqué que les aides de l'État ne représentent « que 7% du coût d'objectif global, contre 35% lors du Mondial-1998. » De fait, il souhaite « une augmentation substantielle de l'enveloppe, histoire de se rapprocher du second pourcentage. »
Concrètement, « si l'État prend en charge quelque 50M€ dans la rénovation de la Meinau, il nous en restera toujours 110M à notre charge, et on en fera notre affaire », assure Ries. « On privilégiera le partenariat public-privé, peut-être sous forme de concession, ajoute Jacques Bigot. Charge au concessionnaire de trouver des ressources dans l'exploitation du stade. »
« Entretenir la mobilisation »
En attendant de connaître la répartition des subsides de l'État, « d'ici une semaine, quinze jours », selon Jean-Pierre Escalettes, l'élaboration du dossier puis la décision finale fin mai, Strasbourg continuera d'avancer « en temps masqué, selon Roland Ries, afin d'être fin prêts le jour J. »
D'ici-là, les élus entendent « entretenir la mobilisation avec les autres collectivités alsaciennes, les milieux économiques et sportifs. » Car, comme le répète Jacques Bigot, « il est inconcevable que Strasbourg ne soit pas à l'Euro si la France est retenue. »
Assurément, on n'a pas fini d'en parler, que ce soit dans le petit cercle des élus, autour des mains courantes des terrains de foot ou à travers la ville. Pourvu que les discussions soient enflammées jusqu'à l'été 2016.
Sébastien Keller (avec AFP)
(*) Nice, Marseille, Toulouse, Bordeaux, Saint-Étienne, Lyon, Lille, Lens, Paris, Saint-Denis et Nancy