Les belles promesses de Jean-Claude Plessis, président du Racing, devront connaître un prolongement concret dans les premiers jours de juin. L'avenir du club, sportivement relégué en National, et à plus forte raison du football de haut niveau à Strasbourg, en dépendent.
Magaye Gueye (à droite, ici à la lutte avec le Dijonnais Morisot), international espoir et auteur d'un début de saison prometteur, fait partie des quatre joueurs susceptibles de rapporter cinq millions d'euros au Racing. (Photo DNA - Cédric Joubert)
Depuis maintenant deux semaines, le discours de Jean-Claude Plessis n'a pas varié d'un iota. Sur la petite ritournelle de « je vais bien, tout va bien, je suis gai, tout me plaît », le président du Racing semble vivre hors du monde et de la ville, dans sa tour d'ivoire de la Meinau.
Cela semble bien
utopique, pour ne pas
dire déraisonnable
En voulant présenter un budget excessivement ambitieux de « dix à onze millions d'euros » histoire « d'éviter tout licenciement économique », Plessis semble surtout vouloir caresser l'opinion dans le sens du poil. Tout cela semble en tout cas bien utopique, pour ne pas dire déraisonnable, dans une division amateur où les gros bras n'ont jamais fonctionné avec plus de la moitié du budget annoncé.
On passera aussi brièvement sur les espoirs grandiloquents de vente de joueurs « pour cinq millions d'euros ». Les Gueye, Bah, Fanchone ou Othon sont certes jeunes et dotés d'un potentiel prometteur - las, tous ne l'ont pas confirmé cette saison, loin s'en faut -, il faudra aller chercher « avec les dents », comme dirait un autre président, les clubs susceptibles de mettre autant d'argent dans un contexte globalement frileux.
Qu'importe. Plessis tente de se montrer convaincant. En ce début de semaine, il veut rencontrer Pascal Janin et nommer, dans la foulée, un nouvel entraîneur. Ou alors garder le technicien à la moustache, puisque celui-ci dispose encore d'un an de contrat. En cas de rupture, il faudra bien payer des indemnités. Bof, Plessis ne doit pas être à quelques milliers d'euros près...
Ries : « Nous ne disposons
d'aucun élément pour
savoir où le club se situe »
Mais le bel enthousiasme de l'ex-cadre de Peugeot n'est pas partagé par tous. Du côté de la place de l'Étoile, siège de la communauté urbaine et de la Ville, les réticences sont grandes. La situation bancale du club plus que centenaire, dont les actuels dirigeants ne peuvent toutefois être tenus pour seuls responsables, laisse même craindre le pire concernant la candidature strasbourgeoise à l'Euro-2016. A quoi bon reconstruire un stade pour une équipe en carton ?
Cette question, le maire Roland Ries a dû se la poser ces derniers jours. « Au moment de poser notre candidature, nous avions une équipe en Ligue 2, aux portes de la Ligue 1, même, a rappelé le maire vendredi dernier après l'attribution à la France de l'organisation de l'Euro. Aujourd'hui, nous sommes en National. Le modèle économique de 2009 n'est plus valable. On ne peut plus considérer, dans l'immédiat, le Racing comme un acteur et un partenaire financier dans cette opération. »
Si l'on excepte le Stade de France, qui n'a pas de club résident, les onze autres villes candidates voient en effet leur équipe jouer en Ligue 1. A Strasbourg, on en est loin. Les mauvaises langues diront même que le Racing est aujourd'hui plus proche d'un dépôt de bilan pur et simple.
« C'est une hypothèse qu'il ne faut pas exclure, même si personne ne la souhaite, ajoutait l'autre jour Roland Ries. En fait, nous ne disposons d'aucun élément permettant de savoir où le club se situe. C'est pour cette raison que j'ai gelé la subvention de 900 000 euros. Si les choses venaient à mal tourner, on me reprocherait de dépenser l'argent public. »
Comme tout le monde, le premier magistrat attend que le brouillard se lève sur la Meinau. A ce titre, l'audition du Racing le 10 juin devant la DNCG (*) sera déterminante. « Nous sommes suspendus à cette décision, confirme Roland Ries. L'entrevue était prévue le 3 juin, mais je crois que les dirigeants ont obtenu un délai de grâce. Je compte beaucoup sur cet "arbitre" pour y voir plus clair. »
D'ici-là, toutes les sorties verbales, fussent-elles croustillantes, de Jean-Claude Plessis seront à prendre au conditionnel. Car si le gendarme financier du football français venait à retoquer les desseins de Fontenla, Hilali et consorts, le haut niveau en termes de ballon rond aurait vécu dans la capitale européenne. Et, partant, les rêves de participer à la fête de l'Euro-2016 seraient certainement emportés au fond du caniveau.
Après des semaines de déclarations fracassantes, d'annonces ronflantes et de vaines promesses, dans un cacophonie grand-guignolesque, le mois de juin sera celui de la vérité. Il sera alors toujours temps de voir renaître une once d'espoir ou du pleurer devant l'ampleur du désastre.
Séb.K.
(*) Direction nationale du contrôle de gestion