Pour en savoir davantage sur ce club, il faut se pencher sur « Le Football et identité en Alsace-Lorraine (1890-1914) » de Pierre PIROT, un article à l’origine inconnu, car non titré et non signé, paru sur le site « Süddeutschen Fussballarchivs » (Archives du football sud-allemand), ainsi que les journaux de l’époque, qui ont notamment permis de constater un surprenant décalage de trois ans dans les dates évoquées par Pierre PIROT.
Le Metzer Sport Verein (MSV) ou Metzer SportVereinigung (SpVgg) ou Union Sportive Messine (USM), voir Club Sportif Messin, aurait été fondé en 1912, bien que son nom apparaisse dans la presse dès 1908.
La multiplicité des patronymes est liée à la déclinaison du nom "association" et à la traduction des deux formes grammaticales obtenues. Il y a aussi une mauvaise volonté de la presse francophile à traduire correctement le nom des sociétés germanophiles, et parfois à les caricaturer, le « Courrier de Metz » et le « Lorrain » leur étant hostiles.
Cependant, le nom exact est bien Metzer SportVereinigung (ou Union Sportive Messine en français) mais siglé MSV, puisque Lucien POINSIGNON, ancien joueur du club, initiateur du CAM et de la Ligue de Lorraine, le nommait ainsi et que le blason du club visible sur la photo suivante (non datée), affichait les trois lettres : MSV.
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(De gauche à droite et de haut en bas, joueurs uniquement : Feirger, Balling, Reiland, Kuhmuger, Looke, Brand, Micciarelli, Feigel, Leonhard, Gunther, Bethge)
Le MSV est donc issu d’une union de clubs, afin de savoir lesquels et d’éclaircir l’année de leur rapprochement, il faut remonter à l’apparition du football à Metz.
En 1900, les élèves de l'Oberrealschule (école supérieure des garçons) dirigée par Justin HIRTZ, affrontent ceux du Kaiserliches Lyceum (lycée).
En 1904, ce même Justin HIRTZ, fonde l’Association pour la Gymnastique en Plein Air (Verein für Freilicht Gymnastik), qui organise des matchs de football dans un but athlétique et hygiénique, sans exhibitions publiques.
En décembre 1904, les plus jeunes membres de l’association, conscients de la valeur propagandiste du jeu, la quitte et fondent en janvier 1905 le FC Métis (Metis, du nom latin de la ville de Metz après l’abandon de celui de Divodurum ou bien du surnom donné aux Lorrains, qui ne sont ni véritablement français, ni véritablement allemands) présidé par M. FISCHER professeur au Kaiserliches Lyceum. Ses couleurs sont le noir et le blanc, c’est-à-dire celles de l’empire Allemand, ce qui laisse supposer que ses membres étaient de vieux-allemands, à comprendre de descendants d’immigrés allemands en opposition aux Alsaciens-Lorrains descendants de français.
En mars 1905, en parallèle de l’Association pour la Gymnastique en Plein Air et créée la société Air et Soleil (Luft un Sonne) qui pratiqua le football, mais en public. Justin HIRTZ en est également le président et il s’agit peut-être là, d’une réponse aux dissidents du FC Métis.
En 1906 est fondé à Montigny-lès-Metz, le FC Lorraine (ou Lotharingia ou FC Lothringen) qui dès le début de l’année 1907, se lia d'amitié au FC Métis avec lequel il multiplia les rencontres. Cette photographie, non datée et non légendée, est probablement le témoignage de l’amitié entre le club de vieux-allemands arborant l’aigle du Reich et celui d’autochtones arborant la Croix de Lorraine.
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Notez que si cette photo est en noir et blanc, une couleur pointe sur les maillots supposés êtres ceux du FC Lothringen. Elle se devine notamment par comparaison avec le maillot noir du gardien assis au premier rang et tenant le ballon avec ses mains.
Au début de la saison 1907-1908, le FC Métis traverse une grave crise. Neuf membres de son équipe première, dont son capitaine en désaccord avec la gestion du club par son président, le quittent pour fonder en octobre 1907 une nouvelle société : le FC Alte Herren Metz, qui signifie le Football Club des vieux messins, mais qui est ironiquement traduit par : Société des sports et de la jeunesse dans la presse française. Le FC Métis qui a du aligner des membres non-inscrits à l’Association des clubs de football d'Allemagne du Sud (Verband süddeutscher Fußballvereine), est exclu de la compétition pour sa première participation.
Fin 1907, le FC Alte Herren Metz qui joue quelques matchs face au FC Lorraine, cherche à s’épanouir. Ses membres se rapprochent de Justin HIRTZ, en tant que président de l’Association pour la Gymnastique en Plein Air, afin notamment de piocher dans son viviers de jeunes gens : l'Association des Jeux de Mouvement de Metz (Verein für Bewegungsspiele Metz, siglée VfBM) est née et Justin HIRTZ en prend encore la présidence.
Mais son existence sera brève. Dès mai 1908, probablement afin de n’avoir plus qu’une seule société à présider, le Luft un Sonne et le VfBM de Justin HIRTZ, ainsi que le très apprécié FC Lorraine, fusionnent pour former le Metz SportVereinigung (MSV 08), la plus grosse association sportive messine comprenant des équipes de foot.
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Novembre 1908 voit la naissance du club de football de la « Lorraine Sportive ». D’abord présidé par M. JAGER, elle est ouvertement hostile à l’Allemagne et se fend même d’un encart dans le « Courrier de Metz » en avril 1909 pour signaler qu’elle est uniquement constituée de français, et donc sans rapport avec le MSV.
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L’association sera finalement dissoute dès 1911 par les autorités et son président depuis 1910, Alexis SAMAIN, condamné pour avoir fait jouer des chansons « de France » et notamment la Marseillaise, lors d'un évènement festif. Son nom sera alors utilisé par la propagande d’état française, qui ira même jusqu’à faire croire à son exécution en 1914, afin de pousser à la guerre contre l’Empire. Alexis SAMAIN, bel et bien vivant, reprendra la présidence de sa société dès janvier 1919, arguant que les « baïonnettes françaises ont déchiré les décrets de dissolution prononcés par nos oppresseurs de jadis ».
Au début de la saison 1911-1912, il ne reste donc que le MSV et le FC Métis qui s’est refait une santé, les deux clubs participants au championnat de football d'Allemagne du Sud depuis 1908, si l’on ne compte pas la saison tronquée du FC Métis. Mais pour cette saison, les deux clubs jouent dans la même division, le MSV finissant devant le FC Métis.
En février 1912, les anciennes querelles sont oubliées : le MSV et le FC Métis fusionnent. Le premier donne son nom au nouveau club et le second ses couleurs. Justin HIRTZ en devient évidemment président et Emile FEIGEL le premier capitaine.
Arrive la guerre qui limite les activités de l'association (qui compte alors 180 jeunes dans ses différentes sections), puis la libération et l’instauration d’un gouvernement militaire pour diriger la ville de Metz. Celui-ci dissous dès 1918 presque toutes les sociétés créées durant l’annexion et le MSV n’y échappe pas. Ainsi, le club formé de vieux-Allemands et d’autochtones, dont les fréquentes oppositions à des équipes du Reich ont permis de passer outre les clivages, ne survivra pas au patriotisme exacerbé généralisé durant la Grande Guerre.
En janvier 1919, la non reconnaissance du MSV est officialisée. Le jeune club disparaît mais son esprit d’union peut perdurer.
Certains de ses anciens membres constituent dès février 1919 un nouveau club : le CA Messin. Justin HIRTZ, pionnier du football messin et pilier de son développement en est évidemment élu président à l’unanimité. Mais c’était sans compter la haine de l’autre et le zèle des fonctionnaires municipaux, qui alerteront les autorités militaires sur le fait que certains membres fondateurs se parlent en allemand sur le terrain et que leur patriotisme serait feint. Justin HIRTZ et ses anciennes sociétés agrées par l’Empire, souffrent de la comparaison avec la Lorraine Sportive de Alexis SAMAIN, dissoute pour son hostilité envers le Reich.
Justin HIRTZ, alsacien de naissance et non vieil-allemand, a beau se fendre de propos patriotiques notamment dans ses courriers aux autorités, leur animosité à son égard empêche la création du club. Seul son remplacement par Maurice DANGLARD en avril 1919, engagé volontaire durant la guerre, ami de Alexis SAIMAN et peut-être aussi le choix des couleurs bleu-blanc-rouge pour les tenues du club, permettront l’enregistrement de ses statuts en août 1919.
D’autres anciens du MSV comme Clément BUNGERT, n'accepteront pas la mise à l'écart de Justin HIRTZ et formeront l’AS Messine en septembre 1919. Elle n’est pas tout à fait le club des ouvriers antagoniste du club des bourgeois du CAM. Bien que Maurice DANGLARD et son successeur Maître MICHAUX soient issus de la bourgeoisie messine, les origines des deux clubs sont à puiser dans le MSV, qui était présidé par un professeur de l’Ecole Réale de Metz et brassait toutes les classes de la société. La frontière entre les deux clubs est d’ailleurs poreuse : beaucoup de joueurs iront de l’un à l'autre.
La suite on la connaît. Le CA Messin passe professionnel en 1932, débauche les trois meilleurs joueurs de l’ASM en début de saison et récidive au début de la suivante. La mairie envisage alors la fusion des deux clubs, qui aura lieu en août 1934, en échange du rachat du stade du CA Messin, pour lui permettre de renflouer ses caisses vidées par le professionnalisme.
L’union sportive messine de Justin HIRTZ est à nouveau effective 16 ans après.
