
Le groupe qui vit bien » est une notion parfois suspecte dans le football. Au nom de la sacro-sainte protection du vestiaire, un joueur ou un entraîneur peut se retrancher derrière ce souverain poncif, pour dissimuler les tensions qui lézardent son équipe. Du côté du FC Metz, justement, Albert Cartier promeut systématiquement cette idée de « solidarité », comme un projet de club et de vie. Heureuse nouvelle : il ne s’agit ni d’une façade ni d’un vernis. Car ses hommes ont prouvé, face à Caen vendredi (2-1), qu’ils étaient mus par cet esprit de corps si cher à leur entraîneur. En voici la preuve en deux temps forts.
Pour la première séquence, il faut rembobiner jusqu’à la 17e minute. Sur un tir flottant de José Saez, Johann Carrasso se troue dans les grandes largeurs, laisse filer le ballon entre ses gants. Le gardien s’effondre immédiatement sur la pelouse, tête enfouie dans ses mains, navré de l’égalisation (1-1) et conscient de sa boulette. Aussitôt, Romain Inez, Guido Milan et Sylvain Marchal ont accouru vers lui. Pour le relever, le rassurer et chasser les mauvaises ondes.
« Le FC Metz a une nouvelle fois prouvé toute sa solidarité en parvenant à s’imposer dans un contexte difficile mais aussi vis-à-vis de moi , convenait Carrasso à l’heure du debriefing. Je remercie mes coéquipiers, le staff et les supporters qui m’ont permis de passer à autre chose. » Son entraîneur en soutien : « On va parler avec Johann mais on doit aussi l’écouter parce qu’il a une bonne analyse, a dit Cartier. Il se met peut-être trop de pression mais il va se rattraper. A Nîmes, c’est peut-être lui qui fera la parade nécessaire. »
« Touche pas à mon Diaf’»
Deuxième image éloquente. Après la main de Mathieu Duhamel dans la surface (54e ), Diafra Sakho dépose le ballon sur le point de pénalty et attend l’autorisation de tirer pour redonner l’avantage aux siens. Le Caennais Koita s’avance alors vers lui pour glisser quelques mots. Romain Rocchi flaire la manœuvre et, tel un garde du corps, vient repousser l’armoire normande sans ménagement, pour préserver la sphère de concentration de son coéquipier à ce moment clef. Un ex-président de la République aurait sans doute susurré quelque chose comme : « Casse-toi pauv’… ». On se plaira à imaginer que Rocchi fut plus élégant, du genre : « Touche pas à mon Diaf’ »…
Albert Cartier n’a pas souligné cet instant en conférence de presse. Il a préféré s’attarder sur le caractère de son buteur, symbole du « match d’hommes » qu’il appelait de ses vœux. « Imaginez ce pénalty , expliquait-il. Il y avait de la pression, ce n’était pas pour les gamins. Diaf’n’a que 23 ans et il a pris ses responsabilités. »
Metz peut voyager loin avec son esprit de groupe en bandoulière. Ces garçons semblent bien décidés à monter ensemble. Alors osons le cliché : ce groupe vit bien.
Christian JOUGLEUX.