Les Messins Anthony M’Fa, Kalidou Koulibaly et Yéni N’Gbakoto peuvent se sentir visés par l’affaire des quotas de binationaux secouant le football français. Leur ressenti ? « De la déception… »

Yéni N’Gbakoto, qui a fait toutes ses classes en équipe de France Jeunes, rêve sans doute de suivre la trace de son ancien coéquipier Sylvain Wiltord sous la bannière tricolore. Du moins si sa binationalité ne pose pas problème… Photo Pascal BROCARD
Le Gabon, c’est avant tout le pays de mes parents. Il y a de la fierté à porter ce maillot. » Anthony M’Fa a fait "son" choix en juin dernier. International français - 16 ans, - 17 ans, - 18 ans et - 19 ans, le gardien messin a laissé parler son cœur et sa raison à l’heure d’opter définitivement pour la patrie de ses aïeuls : « Je n’étais pas en bons termes avec le sélectionneur Francis Smerecki. La sélection gabonaise m’a tendu la main et dans le contexte concurrentiel des gardiens, c’était ce qu’il y avait de mieux à faire. Si un joueur a l’occasion de s’épanouir dans une sélection nationale, n’est-ce pas son droit ? »
Anthony M’Fa a été touché par les propos tenus par le DTN François Blaquart : « Je peux comprendre que la question de la binationalité fasse débat. Mais les mots employés ne m’ont pas plu. Pourtant, on parle souvent d’égalité dans ce pays ».
La devise nationale "liberté, égalité, fraternité" étaye, elle aussi, la pensée de Yéni N’Gbakoto. International tricolore depuis les 17 ans, celui qui a inscrit un but spectaculaire face à Boulogne vendredi pourrait faire jouer, à l’avenir, ses origines congolaises : « Mais pour l’instant, je n’ai aucun contact avec la fédération de la RDC ». Né sur le sol français, c’est ici que Yéni N’Gbakoto a forgé son âme de footballeur et façonné un talent naissant : « Ce fut une immense fierté de porter le maillot bleu. Ce qui compte désormais, c’est de réussir en club et après, seul le destin sait ce qui se passera ». Pourquoi enlever à ce jeune homme le fantasme d’appartenir, un jour, à l’équipe de France, de devenir un successeur de cette génération couverte de gloire en 1998 ?
« Cela me semble péjoratif »
« Oui, pourquoi ? s’interroge le milieu de terrain. Pourquoi remettre en cause un système qui a réussi dans le passé ? L’équipe qui a remporté la coupe du monde en 1998 était constituée de Blancs, de Noirs et d’Arabes. Ce qu’a dit le sélectionneur m’a touché alors que lui-même faisait partie de cette équipe qui a fait naître l’image de cette France "black, blanc, beur". »
Kalidou Koulibaly se situe dans la même situation que celle de Yéni N’Gbakoto : « Je suis Français mais je pourrais opter pour la sélection du Sénégal ». Un pays lointain qu’il n’a fréquenté qu’à l’occasion de séjours estivaux. « Ce qui me décidera ? Je ne sais pas, cela dépendra de la première fédération qui se signalera ».
En attendant, le longiligne défenseur ne comprend pas les fondements de cette affaire nauséabonde : « Je trouve discriminatoire de juger les joueurs sur leurs origines. Cela me semble même péjoratif. Et n’oublions pas qu’avant tout, nous sommes formés par nos clubs et pour nos clubs ».
Au-delà de l’aspect purement sportif de "l’affaire", Anthony M’Fa convoque des vertus étrangères aux propos maladroits tenus par les décideurs du football français. Comme la richesse des cultures, qui a toujours fait la force de la nation : « Depuis que j’ai rejoint la sélection gabonaise, je me suis enrichi. A chaque fois que je reviens d’un pays africain, je ramène un petit plus avec moi. Un petit plus que je partage avec mes coéquipiers ». Cela s’appelle l’ouverture d’esprit. Les hautes instances de la FFF devraient en faire preuve, parfois…
Jean-Michel CAVALLI.
Muller : « Une grosse dérive »
Joël Muller, directeur sportif du FC Metz et président du syndicat des entraîneurs (UNECATEF), dénonce « l’exploitation » des propos tenus par Laurent Blanc dans l’affaire dite "des quotas" binationaux.
• Quel est le point de vue de l’UNECATEF sur cette polémique qui secoue le football français ? « Il y a un amalgame qui a été fait entre une réflexion légitime de la DTN sur l’avenir du foot français, sur le style de joueurs que nous devons former et le terme de quota qui est malheureux. »
• Condamnez-vous les propos tenus par Laurent Blanc, sélectionneur national et le DTN François Blaquart ? « Je pense que comme dans toutes discussions à bâtons rompus, cela a parfois été trop loin. Mais quelques voix se sont élevées pour tempérer les propos, comme celle de Francis Smerecki. Maintenant, l’honorabilité et la personnalité de Laurent Blanc et François Blaquart ne sauraient d’aucune manière mettre en cause leur probité et leur honnêteté intellectuelle. Dans sa carrière, Laurent Blanc a évolué avec diverses nationalités sans que cela pose problème… »
• Il y aurait donc une interprétation tronquée de cette réunion du 8 novembre 2010 ? « Oui, il y a une grosse dérive entre ce qui a été dit ce jour-là et la manière dont on l’exploite aujourd’hui. Pour faire un coup médiatique, Mediapart a cru pouvoir lier certaines déclarations et l’évocation de ces problématiques (réflexion sur l’avenir de la formation des joueurs) à des propos ou des décisions à connotation raciste. Je le répète : l’amalgame est tout à fait inacceptable. »
« Parvenir à un équilibre »
• Dans votre carrière d’entraîneur, vous a-t-on officieusement conseillé de respecter des quotas ? « Jamais, et je ne peux l’imaginer. A Lens, il m’est arrivé d’avoir neuf joueurs de couleur dans l’équipe. Par contre, sans parler de quotas, une réflexion peut être menée sur le style des joueurs. A un certain moment, la dimension athlétique était mise en avant en France. Depuis l’avènement de l’Espagne, certains se sont rendus compte que des joueurs techniques, même de petit gabarit, pouvaient très bien réussir. A mon sens, il faut parvenir à un équilibre. A Metz, par exemple, nous avons besoin de former des joueurs issus de la région. Mais il n’a jamais été, et il ne sera jamais question de pourcentage… »
J.-M. C.
Fc Metz express
Tableau de bord. Hier : une séance. Aujourd’hui : une séance d’entraînement (9h30). Demain : une séance.
D’un match à l’autre. Dernier match : Metz - Boulogne (33 e journée de Ligue 2), vendredi 29 avril : 3-1. Prochain match : Sedan - Metz (34 e journée), vendredi 6 mai à 20h. A suivre : Metz - Le Havre (35 e journée), mardi 10 mai à 20h ; Istres - Metz (36 e journée), vendredi 13 mai (horaire non déterminé).
A l’infirmerie. Nuno Frechaut (cheville) et Rudy Gestede (genou) sont en phase de reprise. Kévin Diaz était dispensé, hier, d’entraînement. Le milieu de terrain a ressenti une douleur à un genou. Des tests doivent être réalisés aujourd’hui. Rappelons enfin que la saison est terminée pour Gaëtan Bussmann (genou).
Suspendu. Aucun.
L’info. Cet après-midi, huit joueurs professionnels du FC Metz ainsi que des membres du staff participeront à l’opération Moselle Foot Citoyen, organisée par le conseil général de la Moselle en partenariat avec le District Mosellan de Football sur les installations du club de Stiring-Wendel à 14h. Les Grenats co-animeront les ateliers football et citoyen proposés aux jeunes footballeurs à cette occasion.