
Avant de recruter, le Racing doit dégraisser. Et vendre certains joueurs qui n'entrent plus dans les plans de Pascal Janin. A l'image de l'attaquant Simon Zenke, qui a un temps de jeu famélique depuis le début de saison. (Photo DNA - Michel Frison)
Dans sa tumultueuse histoire, jamais encore le Racing ne s'était trouvé dans pareille situation. Faute d'avoir répondu aux exigences de la Direction nationale du contrôle de gestion (DNCG), mercredi (lire notre édition d'hier), le club plus que centenaire a été placé sous recrutement contrôlé.
Concrètement, aucun renfort
ne peut débarquer aujourd'hui
Dans l'éventail des sanctions infligées par le gendarme financier du football français, cette mesure est toutefois la moins coercitive.
En National, par exemple, Louhans-Cuiseaux a été récemment frappé d'une peine bien plus lourde, en raison de ses problèmes financiers : une exclusion pure et simple de la compétition. En interjetant appel, le club bressan a gagné un sursis qui pourrait expirer au courant du mois.
Fort heureusement, Strasbourg n'en n'est pas là. Tout au moins pas pour l'instant. Mais le problème reste entier. Sur le compte courant du Racing, Alain Fontenla n'a toujours pas injecté le moindre sou. En nommant Luc Dayan pour restructurer le club - ce qu'il est parvenu à faire avec réussite du côté de Lille et de Nantes -, l'actionnaire majoritaire n'a visiblement pas l'intention de mettre la main à la poche.
Pour fonctionner, et notamment payer les salaires de ses employés, le Racing a pourtant besoin de liquidités. Avant de passer la main, le binôme Ginestet - Herzog avait fait savoir aux actionnaires qu'ils seraient sollicités dès les premières semaines de l'année, à hauteur de 800 000 euros.
Au total, il va falloir créditer le compte courant de 2,8 millions d'euros au cours du printemps, une somme récupérable à la fin de l'exercice après les éventuelles ventes de joueurs. Et c'est justement parce que Fontenla n'a pas déposé cette garantie que la DNCG demande expressément au Racing de garder une masse salariale constante.
Concrètement, aujourd'hui, aucun renfort ne peut débarquer à la Meinau, même s'il est libre de tout contrat ou prêté. Son contrat ne sera pas homologué par la Ligue professionnelle, du moins pas tant qu'un des 28 pros strasbourgeois n'aura plié bagages.
Et c'est justement là où le bât blesse. Parmi les joueurs placés sur la liste noire par Pascal Janin, aucun ne risque de déclencher une foire d'empoigne auprès d'acquéreurs potentiels. « Ça va être compliqué d'en placer un », reconnaît-on à mots couverts dans les couloirs de la Meinau.
A moins que le conseiller sportif Ralph Isenegger - définitivement injoignable - n'active ses réseaux et ne trouve un club au fin fond de l'Ukraine ou de l'Ouzbékistan, la porte de sortie devrait rester close pour ceux qui affichent un temps de jeu famélique en Alsace.
L'autre option consiste à se délester des gros salaires - du genre Gargorov ou Rodrigo -, voire de chercher à monnayer les rares joueurs à "valeur ajoutée", à l'image du petit Gueye. Hier soir, le coach envisageait pour la première fois cette hypothèse peu reluisante.
« Je serais peut-être obligé de lâcher des joueurs que j'aurais voulu garder, et il faut l'accepter », reconnaît le coach, dont la ligne de conduite apparaît de moins en moins claire au fil des jours. Ce qui a visiblement le don d'agacer une partie du vestiaire strasbourgeois.
Pour l'heure, les supposés allers et venues au sein de l'effectif se heurtent à un autre obstacle : la vacance de présidence. Depuis le 4 décembre, Julien Fournier est le seul à être habilité à apposer sa signature au bas d'un papier officiel émanant du Racing.
Or le PDG, dont on est sans nouvelle depuis le début de l'année, négocie son départ. Sauf à obtenir de lui une dérogation, les nouveaux dirigeants ne peuvent rien entreprendre. Ils ne sont pas non plus pressés de clarifier la situation, aucune assemblée générale de la SASP n'ayant été convoquée pour l'heure. Quand on sait que le délai légal pour réunir les administrateurs est de quinze jours, le statu quo risque fort de perdurer.
« Je m'étonne de voir
que l'encadrement
grossit de jour en jour »
Cette situation ne cesse d'irriter les "petits" actionnaires, de plus en plus remontés. « Les repreneurs ne prennent pas en compte l'environnement local et font fi de nos considérations, déplore Dominique Pignatelli. Je m'étonne aussi de voir que l'encadrement du club grossit de jour en jour, avec les arrivées d'un chargé de communication, d'un conseiller sportif, voire d'un recruteur ou d'un adjoint, alors que la masse salariale est encadrée. De notre côté, on reste vent debout contre les nouveaux venus. Notre projet de reprise avance. Encore faudrait-il avoir un vendeur identifié en face de nous. »
Dans ce contexte toujours aussi glacial, Luc Dayan cherchera cet après-midi, devant la presse, à rendre son action crédible et présentable. Faut-il s'attendre à un nouveau tour de passe-passe ?
Séb.K.